Les guerres de Religion : Carcistes et Razats
En 1576, le Roi signe un édit qui déchaîne la colère des catholiques parce qu'il donne aux huguenots le droit de pratiquer leur religion et même de posséder quelques places fortes. Ce fut le signal de nouveaux troubles en Provence, qui fut meurtrie, en 1578 et 1579, par une guerre à mort entre les deux partis : les Carcistes et les Razats. Les Carcistes étaient les catholiques enragés, qui avaient à leur tête, le Comte de Carcès, grand Sénéchal de Provence, les Razats, parmi lesquels se trouvaient des protestants et beaucoup de catholiques modérés, étaient ainsi appelés - les uns disent parce qu'ils n'avaient pas de barbe, les autres parce qu'on les avait persécutés, pillés, rasés - et certains croient que leur nom venait de leur chef, le Gouverneur de Provence, qui était le Maréchal de Retz. Deux années de suite, la Provence fut ravagée, pillée, ensanglantée par les uns et les autres. Dans certains endroits, ce fut un sorte de jacquerie, de révolte des paysans contre leur seigneur. C'est ainsi que les habitants de Callas assassinèrent leur seigneur qui avait 80 ans, tuèrent ses deux fils et brûlèrent son château. Celui des Forbin, à Solliès fut démantelé, ceux de Sainte-Maxime, de Bauduen, de Pierrefeu et de Cuers furent livrés aux flammes. Tous ces incendiaires étaient des Razats.
Prise du château de Trans le 23 mai 1579
Ce furent encore des Razats qui vinrent assiéger le château de Trans dans les derniers jours de mai 1579 avec deux canons empruntés à la ville d'Antibes. Ils furent mis en position devant le château et commencèrent à le bombarder. Cependant, les assiégés opposèrent une résistance désespérée. Parmi eux, se distingua la Marquise de Trans, fille du Comte de Carcès. Le Marquis Claude de Villeneuve et sa femme défendirent le château avec un courage héroïque. Les pertes furent importantes dans le camp des assiégeants : une les affecta particulièrement, ce fut la mort du Baron d'Estoublon, gentilhomme protestant, l'un des chefs de guerre des Razats. Après deux jours de canonnade, le château fut pris d'assaut le 23 mai 1579. Les Razats parvinrent à appuyer leurs échelles et les voilà monter à l'assaut des remparts et tuer les soldats qui le défendaient. Le Capitaine Séguran de Draguignan porta le coup mortel au Marquis et à une demi-douzaine de gens de son entourage. Ses hommes en firent autant et voilà le château aux mains des Razats. La Marquise de Trans eut beaucoup de peine à s'enfuir par les toits laissant son petit enfant au berceau. Un soldat prit le petit et voulut le jeter par la fenêtre, quand un muletier dracénois nommé Trabaud lui dit : "Que vas-tu faire de cet enfant ?" "Je vais le sacrifier à mon maître" répondit le soldat.Trabaud rétorqua "Mais à quoi te servira-t-il de faire périr ce pauvre innocent ?" "Si tu veux me l'acheter dit le soldat, je te le vends pour le prix que tu me donnes". Le muletier mit la main à sa bourse et en tira cinq sous qu'il tendit au soldat. Le soldat les prit et remit l'enfant à Trabaud. Celui-ci l'emmena à Draguignan et le fit nourrir par sa femme qui lui donna du lait pendant six ou sept mois, puis Trabaud le rendit à la Marquise.
Sources : D'après un texte paru dans le Bulletin Municipal de Trans en Provence n°22 septembre 1988. Egalement d'après le Dictionnaire historique "Histoire de la Provence" de Gaufridi 1694.