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Trans en Provence au fil de la Nartuby
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Trans en Provence au fil de la Nartuby
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8 mars 2024

Des histoires de brigands et bandits de grand chemin

Chauffeurs

 

Gravure représentant une bande de chauffeurs

 

Cela se passait en prairial de l'an IX, c'est-à-dire au printemps de l'année 1801, sous le Consulat. A cette époque, il y eut dans toute la France une flambée de banditisme. C'est alors que les campagnes furent terrorisées par les célèbres "chauffeurs" qui brûlaient la plante des pieds de leurs victimes jusqu'à ce qu'elles révèlent la cachette de leur or. Les routes n'étaient pas sûres. Les voyageurs isolés étaient agressés. A Trans, comme ailleurs, on vivait dans une atmosphère d'insécurité dont témoignent les histoires vraies que voici :

 

Le 11 prairial de l'an IX, Joseph Roux laboureur, fait au maire de Trans le récit suivant : "Le 5 du courant à 9 heures su soir, il passait au chemin qui va de Trans au Muy, au quartier de Saint Vincent, monté sur un âne, lorsqu'il entendit derrière lui : "arrête !", et de suite on lui lâcha un coup de feu chargé à petits plombs qui perça ses habits et atteignit sa monture. Et comme ledit Roux voulait s'enquérir d'où le coup était parti, il fut assailli d'une grêle de pierres qui  paraissaient venir du bosquet voisin et être lancées par plusieurs personnes. Et comme il prit la fuite, ses assaillants le poursuivirent à coup de pierres jusqu'au chemin du Peycal (Peical de nos jours) que prit ledit Roux, où ils le quittèrent en lui disant que, s'il n'avaient pas pu l'atteindre de jour, ils l'auraient de nuit".

Quelques jours plus tard, c'est un propriétaire du Puget près de Fréjus (Puget sur Argens) Louis Barbe, qui dépose une plainte. Venant du Puget à Draguignan, ce jourd'hui 22 prairial, il a été arrêté à 7 heures et demie du matin sur les limites des terroirs de La Motte, du Muy et des Arcs et sur le Grand Chemin par deux hommes dont l'un, posté derrière un buisson au bord du chemin, le tenait en joue avec son fusil, et en s'approchant de lui avec un pistolet à la main lui a dit "Arrête ! La bourse ou la vie !" Barbe a jeté au voleur deux écus de six francs et trois petits écus, ce qui ne l'a pas satisfait. Il l'a obligé à descendre de son cheval et il a fouillé partout dans ses habits et lui a enlevé trois louis d'or et une montre en or. Après quoi, Barbe est remonté à cheval et a piqué des deux criant : "Au voleur !" mais il n'a rencontré personne aux environs. Celui qui l'a fouillé lui a paru être âgé de 45 ans et la taille d'environ 1 mètre 625 millimètres (malgré sa frayeur Monsieur Barbe avait de la précision ! ), ayant le bas du visage couvert d'un mouchoir et un peu voûté, grosse tête, yeux noirs, cheveux peu fournis, grand chapeau rond, gilet noir, culotte longue de grosse toile grise, en manches de chemise, avec un pistolet d'arçon".

 

Pistolet d'arçon

 

Pistolet d'arçon

 

Enfin, la dernière histoire a pour théâtre un endroit où la tradition transiane place volontiers les histoires de brigands. Lorsqu'on va de Trans aux Arcs et qu'après avoir dépassé le haut de la montée, on redescend vers les Arcs, on se trouve dans un ravin assez sombre que l'on appelle "La Gouarge de Rastéou", "la "Gorge de Rateau". Rateau était, paraît-il, un bandit qui attaquait là les diligences. Le 12 floréal de l'an IX , un cordonnier de Draguignan, Philippe Jacques Herr raconte l'agression dont il a été victime à cet endroit mal famé : "Ce jourd'hui, 12 floréal, il a été arrêté à l'heure de midi sur le chemin des Arcs, à une demie-lieue environ de distance de Trans, par deux hommes armés chacun d'un fusil, dont l'un était habillé de gris avec des guêtres de peau, un chapeau rond, ayant le bas du visage couvert d'un mouchoir et l'autre était habillé d'une étoffe couleur verte, chapeau rond et guêtres de peau. Et l'ayant couché en joue avec leurs fusils, ils lui on demandé "la bourse ou la vie". Le cordonnier a jeté aux voleurs environ 60 francs qui ne les a pas satisfaits et, l'ayant fouillé, ils lui ont pris encore quelques écus qu'il avait dans les poches de son corset et celui par qui il a été fouillé est parti avec l'agent en disant à l'autre voleur : "Ramasse ta part qui est par terre". Le cordonnier se voyant seul avec celui qui ramassait l'argent par terre, a pris une pierre et l'a jeté avec force sur le dos du voleur qui, étourdi du coup et quoiqu'armé d'un fusil a pris la fuite et laissé par terre 32 francs que Herr a ramassé".

 

Source : Conférence de Monsieur Margueritte professeur d'histoire à l'Ecole normale de Draguignan "Le brigandage dans le Var entre 1795 et 1802" à la Société d'Etudes de Draguignan.

 

Brigands

 

Complément

 

Le brigandage entre 1795 et 1802 fut un fait très significatif dans le Var, qui regroupait un ensemble très composite : prêtres réfractaires, émigrés dont on avait saisi les propriétés, jeunes refusant la conscription, déserteurs de l'armée d'Italie, miséreux (surtout dans la période de 1795), bandits pratiquement professionnels, évadés du bagne de Toulon... On en comptait donc plusieurs milliers et il fut bien difficile compte tenu de la mobilité de ces brigands (leur repaire se trouvait à Ginasservis), de remettre de l'ordre dans cette situation qui ne cessait, on sans doute, d'inquiéter les autorités de l'époque. Toutes les archives, ou presque sur cette période de troubles ont disparu. On fit donc appel aux services de la gendarmerie et aux gardes nationaux, car il fallait bien mettre un terme à cette situation qui fit tout de même près d'un millier de morts en deux ans. De nombreuses attaques de diligences et plus particulièrement celle effectuant le trajet Aix-Brignoles. Le brigandage visait essentiellement les nouveaux bourgeois, certains administrateurs républicains, d'anciens jacobins. On organisa donc de véritables "battues" et chasse à l'homme, en instaurant également les garnisaires* où dans chaque foyer de brigand était installé un gendarme. La répression militaire intervint pour une grande part. Ce n'est que sous le Consulat que cette situation redevint normale et les dernières condamnations à mort (vingt-trois) furent prononcées en 1804.

 

*Définition de garnisaires : Agent qu'on établissait en garnison chez un débiteur pour garder les meubles saisis, chez les contribuables en retard pour les obliger à payer ou chez les parents d'un jeune homme qui ne s'était pas présenté à la conscription.

 

Source : Article de journal sur la conférence de Monsieur Margueritte à Société d'études de Draguignan.

 

Si vous voulez en savoir plus sur les chauffeurs :

 

http://fr.wikipedia.org/wiki/Chauffeurs

 

Commentaires
J
Bonjour,<br /> <br /> Et merci pour cette explication toponymique qui m'agrade davantage que les Bô-Doî (soldats vietnamiens) et autres bidoies ou bidos trouvés dans le Trésor du félibrige (1878 - https://www.lexilogos.com/provencal/felibrige.php?q=Bidoï).<br /> <br /> Et encore bravo et re-bravo pour votre blog !
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J
Vous qui en savez tant sur votre Var, un certain Joseph PONS, brigand très probable de la bande de Rians, a été fusillé en 1801.<br /> <br /> Selon ce que j'ai trouvé, il était surnommé Bidoï ou Le bidoï.<br /> <br /> Avez-vous une idée de la signification ou de l'origine de ce sobriquet ?
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M
Mon dieu quelle époque , aujourd' hui dieu merci nous n' avons plus ce genre de raquetteurs mais ils sont quand même toujours présents et ils s' appellent maintenant GOUVERNEMENT et le raquette est autorisé ha ha ha .... <br /> <br /> <br /> <br /> Bon vendredi à toi , prend soin de toi , le temps passe trop vite . <br /> <br /> Gros bisous marseillais . <br /> <br /> Renée (mamiekéké).
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L
J'espère que c'est plus sur dans la commune ??? je plaisante un peu, car de nos jours !!! qui peut garantir la sécurité à quelque part !<br /> <br /> Merci pour toutes ces explications.<br /> <br /> Bonne fin de journée...<br /> <br /> Bises affectueuses....<br /> <br /> A++
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